Publié le 15 août 2023
Écrit par Alex
Catégories
Avertissement :
Tout au long de cet article, nous utiliserons alternativement le mot grille-pain (invariable), ou l'anglicisme toaster pour désigner l'objet qui sert à griller des tartines de pain. Il s'agit d'un seul et même objet. Désolé pour les puristes.
Le grille-pain, ce symbole !
Le grille-pain, c'est un peu un symbole.
Symbole de l'objet inintéresssant, au travers du fameux "Je vous ai dit que ma grand-mère avait acheté un grille-pain ?"
Symbole du petit électroménager, celui que tout le monde possède.
Symbole du jetable. Le grille-pain est probablement sur le podium des électroménagers les plus réparés dans les repair-cafés[1], et dans la foulée sûrement parmi les électroménagers les plus jetés, du fait de leur faible prix et du coût de la réparation.
Alors pourquoi ne pas commencer par ce symbole pour baser une réflexion sur la remise en question du marketing dans l'électroménager, et aborder un peu ma façon bien particulière de faire un choix parmi la pléthore d'objets, d'outils ou d'électroménager que le marché nous propose !
Je n'ai pas de tee-shirt grille-pain, mais vu le résultat de mes recherches pour écrire cet article (et trouver un grille-pain) je vais penser à m'en faire un !
Motorisé, tactile... "innovation", vraiment ?
Tout a commencé lorsque je suis sorti descendre les poubelles, dans notre ancien appartement de Lyon. C'était un immeuble assez cossu avec de grands appartements loués hors de prix (le notre était petit...). Je descends les poubelles donc, et y trouve un grille-pain.
Un grille-pain n'a rien à faire dans la poubelle grise : c'est en déchetterie qu'il faut le jeter, ou là ou vous avez acheté le nouveau ! Je le sors donc de la poubelle, pour l'emmener avec moi.
Il ne s'allume pas du tout. Il n'aurait pas été là sinon (quoique...). Déformation professionnelle oblige, je me mets en tête de le réparer. C'est ainsi que je découvre ses caractéristiques : c'est un grille-pain électronique motorisé. Par électronique, je veux dire qu'il à des boutons, qu'on presse, avec de diodes qui s'allument :
- Bouton "+" qui fait s'allumer une diode de plus, à la place de la simple molette.
- Bouton "start" et "stop", comme une télécommande, des boutons électroniques.
Et par motorisé, j'entends qu'il y a un moteur, pour faire descendre et remonter le pain. Vraisemblablement, utiliser un ressort, c'est un peu à l'ancienne.
Comme vous, à cet instant, je reste dubitatif. Pourquoi concevoir un tel objet ? Qui achète ce genre de grille-pain (mes voisins, visiblement) ? Et surtout, qu'est-ce qu'il a de plus que le grille pain que j'ai toujours connu ? Divulgâchage: rien.
Et c'est là qu'a commencé mon cheminement dans les méandres des technologies et du marché du grille-pain.
Le monde infini des grille-pain
J'ai découvert[2] :
-
Le grille-pain tactile : où grille-pain "intelligent". Il est doté d'un écran qui vous présente le niveau de doré que vous allez obtenir. Utile si vous oubliez constamment comment marche votre grille-pain.
-
Le grille-pain vitré pour voir son pain pendant qu'il grille. Un truc de maniaque du contrôle (ou de voyeur ?), j'imagine...
-
Leur opposé : le grille-pain low tech par excellence. Un produit Britannique. Une fourchette de toast, qui est en fait une fourchette monté sur un ressort avec un support magnétique. Fixez (grâce à la force magnétique) le support sur le dessus de votre poêle à bois. Placez un toast entre la fourchette et la paroi vitrée de votre poêle. Le ressort plaque le toast, et ainsi le laisse griller à la chaleur du poêle ! À vous les toasts grillés pour accompagner foie gras et oeufs d'esturgeon...
Et entre ces deux extrêmes, il y a tout une gamme, dont je vais tâcher de vous exposer les tenants, les aboutissants, et le pourquoi de notre choix !
Les déformations professionnelles d'Alex, appliquées au grille-pain
Ceux qui me connaissent bien savent déjà. Pour les autres, je vous explique.
J'ai été, après mes études d'ingénieur en électricité et électronique, un expert de l'étude de marché appliquée au semiconducteur[3] et aux convertisseurs électriques. De cette expérience, et de mon caractère, en sont ressortis une "certaine" tendance à faire une étude de marché complète avant un achat important.
- J'ai étudié Le marché du vélo, orienté voyage/gravel/vélotaf avant de me décider pour un Genesis Croix de Fer.
- J'ai une connaissance pointue du marché du vélo cargo, orienté biporteur (qui devient très vite très étoffé), des options possibles de phares pour un VAE (Supernova ou rien)
- Mais aussi des plaques inductions, des hottes de cuisine ou des aspirateurs (vous connaissez henry ?)...
Chacun ses travers !
Il se trouve aussi que s'y ajoute, maintenant que je suis réparateur, cette volonté de trouver des produits éthiques, durables, réparables, voir authentiques, et idéalement tout ça à la fois.
J'ai donc fini par développer une technique assez fine, mais coûteuse en temps, de sélection d'équipements, qui fera surement l'objet d'un prochain article.
Voyons ce que ça donne sur un grille-pain.
Comment ça marche un grille-pain moderne
Le grille-pain d'aujourd'hui est basé sur une puce électronique de gestion... de grille-pain. C'est pas une blague. Tous les électroniciens qui ne le savaient pas doivent décrocher la mâchoire en voyant une datasheet (espèce de notice de puce électronique) intitulée "Toaster controller". Diodes inc. fabrique donc une puce dont la seule utilité est de contrôler les grille-pain. Elle a une patte pour sa propre alimentation, une patte pour le mode décongélation, une patte pour le mode réchauffage, et deux pattes qui viennent s'attacher de chaque côté du bouton que vous tourner pour régler le niveau de "grillage" (c'est en fait, une minuterie).
Cette puce s'occupe de tout ça, et de "libérer" l'électroaimant qui maintenait le pain en bas, libérant le ressort qui fait sauter vos tartines. Cette puce, comme tous les circuits intégrés, est alimentée en basse tension : entre 3.5 et 5.5 Volts courant continu. On est loin des 220 Volts alternatifs de la prise de la maison.
Un concepteur ingénieux s'est dit qu'il allait utiliser les résistances qui chauffent le pain, afin de créer cette basse tension indispensable. Si vous êtes familier avec la notion de pont diviseur de tension, c'est exactement ça : l'idée est d'aller se placer au bon endroit sur la longueur de fil chauffant, pour y trouver le 5 Volts recherché.
En clair, votre grille-pain à l'arrêt ne consomme aucune énergie. En appuyant sur le bouton-ressort, vous branchez les résistances chauffantes, qui elles-mêmes permettent de créer la tension de 5 Volts qui alimente la puce de gestion du grille-pain (le "Toaster controller") qui met sous tension l'électroaimant qui prends le relais sur votre doigt pressé sur le ressort. Conséquence, le pain reste en bas, et les résistances chauffent.
Lorsque notre Toaster controller arrive au bout de son décompte, il coupe l'alimentation de l'électroaimant, cela libère le ressort (donc le pain, qui saute), mais cela coupe aussi l'alimentation des résistances qui elles-mêmes alimentaient le Toaster controller...
C'est une espèce de boucle fermée, qui s'ouvre au bout du décompte...
La perfection : un grille-pain pratique, mais sans électronique
Au gré de mes recherches sur un modèle de grille-pain réparable, je suis tombé sur les grille-pains fabriqués par la société Dualit. Ce sont des anglais, comme par hasard: le pays du toast, ou pain de mie, comme appelé chez nous. Le grille-pain a un dessin très reconnaissable et assez intemporel. Certains le qualifierait de "vintage", terme tellement galvaudé que cela ferait presque moderne. Mais surtout, la société fabrique des grille-pains sur la base du même concept depuis 1952, avec un design n'ayant pas bougé depuis les années 70.
Le principe est simple, purement mécanique, pleinement démontable et réparable, avec des pièces "compatibles avec la majorité des toasters fabriqués ces 40 dernières années (sic)" et c'est ce qui m'a tout de suite plu.
Ce toaster, donc, n'utilise pas de "Toaster controller", mais une simple minuterie (un truc qui fait "tic,tic,tic", comme la minuterie en forme d'œuf de mamie...). À la fin du temps, il s'arrête. Il n'y a pas de ressort, pas de sonnerie, rien. Un interrupteur à bascule permet de choisir d'allumer une ou les deux fentes. L'interrupteur à bascule, c'est cet interrupteur en plastique, rouge, qui s'allume quand on appuie dessus. Oui ! Ce truc increvable, qu'on trouve partout depuis 40 ans et que n'importe quel adorateur d'Apple considérerait comme une faute de goût impardonnable.
Ce grille-pain existe aussi en version large, pour les cuisines, ou la restauration collective (les petit-déj buffet des hôtels). Avec une version 4, ou 6 fentes.
C'est aussi à ça que je reconnais un équipement durable, un équipement efficace, un équipement qui vaut la peine de s'y attarder : c'est l'équipement que les professionnels utilisent. (Un indice sur la façon de trouver un équipement de qualité...).
Quant à la réparabilité, il suffit de retirer les six vis cruciformes de la base pour l'ouvrir, et accéder aux plaques de résistance, remplaçables facilement elles-aussi.
Voilà un équipement quasi parfait à mes yeux : Une fonction unique sans superflu, fabriqué à l'identique depuis quasiment 40 ans, toujours fabriqué aujourd'hui, qui équipe des professionnels, réparable et dont les pièces sont encore disponibles.
Ça pourrait être plus low-tech, mais ce serait bien moins pratique. Ça pourrait être plus high-tech, mais ça ne serait pas plus confortable.
Confirmé dans cet article de HOP (Halte à l'Obsolescence Programmé) sur le grille-pain. ↩︎
Ces images sont la propriété des fabriquants respectifs: Charnwood, Revolution, Seb-Magimix et Cuisinart. ↩︎
Non, le semiconducteur n'a rien à voir avec la logistique ou les camions (on m'à déja posé la question...). C'est ainsi qu'on désigne les matériaux utilisés pour fabriquer des puces électroniques, et par extension l'industrie associée. ↩︎
Publié le 15 août 2023
Écrit par Alex
Catégories
Sommaire