Pour dépasser, changez de côté !

Un mètre et demi, c'est trop compliqué

Aussi étrange que ça puisse paraître, "un mètre et demi", c'est compliqué à respecter comme règle du code de la route. Étrange, oui, car tout le monde sait ce que ça fait, un mètre et demi : plus ou moins un petit adulte, la taille d'un⋅e jeune de 14 ans ?

Mais compliqué quand il s'agit de doubler : il faut se souvenir du chiffre, estimer ce que ça fait au sol, au-delà du gabarit de sa voiture (qui n'est déjà pas tout le temps bien maîtrisé...) et de son rétroviseur (oui, lui aussi il compte, cf. le paragraphe IV de l'article R414-4 du code de la route). Force est de constater que ce mètre et demi n'est pas respecté.

Ma supposition ? La marge pour doubler un cycliste ne doit pas être le sujet d'une évaluation personnelle. Tout le monde n'a pas la même capacité à faire des évaluations justes. Dire "il faut laisser 1m50 entre le véhicule et le cycliste que vous dépassez" (Thomas Voeckler, sur le tour de France, dans le cadre du partenariat avec Route Plus Sûre^[1]), c'est laisser les automobilistes juges de la bonne marge entre eux et le cycliste. Ils peuvent aisément mal juger, sans mauvaise intention. Sans compter que...

Le problème des panneaux

À ce jour, le panneau censé rappeler la règle des "un mètre et demi" porte, de façon subliminale, l'exact contraire du message qu'il est censé véhiculer...

Il y a un (gros) souci d'échelle : vu la taille du cycliste et la taille de la voiture, l'espace entre les deux est loin de représenter un mètre et demi. En premier lieu, on pourrait donc commencer par produire une image à l'échelle, pour donner à voir ce que c'est que de laisser "un mètre et demi". Ce serait un beau progrès.

Une exception du code ?

Après quelques recherches, il n'existe pas d'autre mention dans le code où les automobilistes doivent estimer une distance eux-mêmes, sans aucun repère :

• Les distances de sécurité : toutes les distances sont mises en évidence, par des moyens divers et variés. On a mis des lumière bleues et oranges dans les tunnels, pour que chacun voit de lui même ce que font les 150 mètres à laisser entre deux véhicules. Sur l'autoroute, les bandes blanches à droite sont là à cet effet.

Un trait, danger. Deux traits, sécurité !

• Les gabarits de hauteur : une barre avec des perches ou des chaînes, parfois même des panneaux lumineux, vous rapellent que si la galerie du camion fait plus de 2m30 vous allez exploser le plafond (ou le pont devant vous...).

Un nouveau message

Ce mètre et demi qu'il faut laisser avec un cycliste, c'est juste le minimum légal. Laisser 2 mètres, voire 3, si vous les avez... ça marche aussi ! C'est d'ailleurs ma technique : je ne me préoccupe pas du "mètre et demi", je me déporte complètement sur la voie de gauche. De trop rares automobilistes font la même chose, et que ces dépassements sont rassurants !

Et si c'est ce qu'on demandait à tout le monde ?

Un slogan marketing

La majorité des messages de prévention ont été simplifiés au maximum. Lorsque l'on veut que les gens retiennent une idée, on la simplifie. C'est le B-A BA du marketing. Idéalement, on trouve un slogan ou une chanson qu'il sera impossible de s'ôter du crâne :

"Des pâtes, des pâtes, oui mais des P*****"

Ça fonctionne pareil pour tout :

"Les antibiotiques, c'est pas automatique"

Mais aussi :

"Un verre ça va, deux verres, bonjour les dégâts"

Ou plus récemment :

"Quand on tient à quelqu'un, on le retient"

La sécurité routière sait faire. Un jour, dans une campagne de pub, l'affiche disait :

"Quand vous frôlez un cycliste, lui, il frôle la mort".

Du coup, je vous propose :

"Pour dépasser, changez de côté !"